Mai 1911 – Échec de l’école internationale d’aviation de Passy (Haute-Savoie)


Quelques années après les débuts de l’aviation, quelques entrepreneurs misant sur le développement inéluctable de l’aviation, créent, un peu partout en France, des écoles de formation visant à multiplier le nombre de pilotes brevetés. Il s’agit d’ailleurs d’un mouvement assez général en Europe. Aujourd’hui, Pilote de montagne s’intéresse à l’École internationale d’aviation de Passy (74/Haute-Savoie), dont il faut méditer l’échec cuisant…

UN PHÉNOMÈNE HISTORIQUE

Les premières écoles d’aviation françaises sont créées en France dès 1908. Cependant, en 1909, afin de faire face à l’afflux des nouveaux aviateurs et dans le but de diminuer le nombre d’accidents, l’Aéro-Club de France (ACF) entreprend de délivrer des brevets d’aviation dont la réglementation nationale est instituée le 1er Janvier 1910. C’est bien l’institution du brevet qui conduit à la création de ces écoles.

Le phénomène gagne tout naturellement le Sud-Est du pays, en commençant par la région lyonnaise. Mi-octobre 1910, Roger Sommer ouvre l’école d’aviation de Bron, dont la direction est confiée à Albert Kümmerling et qui attirera des instructeurs locaux, comme Louis Plantier par exemple.

Dans la même période est créé l’aérodrome et l’école d’aviation de Viry (74/Haute-Savoie), dont la direction est confiée à Émile Taddéoli, et qui servira beaucoup aux aviateurs et aux constructeurs aéronautiques genevois (Suisses, donc), ceux-ci y faisant la promotion de leurs appareils respectifs.

CRÉATION DE L’AÉRODROME DE PASSY

Plus loin, dans la vallée de l’Arve, l’ingénieur marseillais Charles Vallet ouvre, tout près du mont Blanc, l’École internationales d’aviation de Passy, avec le soutien financier de l’industriel Schmidt, directeur des soieries de Faverges. C’est l’ancien chef-pilote du constructeur René Hanriot (implanté à Reims, alors célèbre terre d’aviation) qui arrive à Passy avec trois appareils de cette marque prestigieuse.

À cette époque, l’aviation n’est pas encore un sport populaire. D’un tarif prohibitif, les cours ne sont accessibles qu’à une clientèle fortunée, celle qui fréquente les palaces de certaines stations thermales à la mode, comme Saint-Moritz ou Davos, dans les Grisons suisses, par exemple. Donc, pourquoi pas Passy, susceptible de drainer certains curistes de la station thermale de Saint-Gervais-les-Bains, elle aussi en quête d’activités à sensations et pouvant, potentiellement, profiter d’incursions dans les collines toutes proches et de la vue sur le Massif du mont Blanc ? Pour faciliter l’accessibilité de l’aérodrome, on imagine même créer, un câble aérien de 5 km de long pour acheminer les élèves-pilotes (et aussi les curieux) depuis le Palace-Hôtel de Chorousse jusqu’à la piste…

Malheureusement, faute d’une étude de marché approfondie et malgré l’organisation d’une fête inaugurale dont la date reste à cerner, le lancement de l’École internationales d’aviation de Passy reste sans lendemain. En effet, pendant un mois d’une activité atone, un seul élève tchèque (un Austro-Hongrois, donc) se présente. De ce fait, la flotte de Passy est jugée surdimensionnée et le projet bien trop ambitieux pour l’époque, ce qui conduit à sa ruine et à son abandon.

ÉPILOGUE

Comme l’exemple de Passy le démontre bien, l’époque n’est pas encore mûre pour intégrer de véritables aérodromes dans les régions montagneuses. En effet, les curistes constituent une clientèle certes aisée, mais pas forcément téméraire. Rappelons-nous que si l’Allemand Paul Engelhard décolle, le jeudi 10 mars 1910, depuis le lac gelé de Saint-Moritz aux commandes d’un Wright Flyer, c’est pour faire la promotion de la marque américaine et afin de remporter un (voire plusieurs) prix, pas pour perdre de l’argent…

La plateforme de Passy ne devient rentable qu’après la première guerre mondiale, lorsque Firmin Guiron s’y installe à la fin des années 1920 et y crée la société Mont Blanc Aviation, et plus encore lorsqu’il y accueille une Section de l’aviation populaire (SAP). Une plateforme aérienne qui rend de nombreux et fiers services pendant le deuxième conflit mondial, et ensuite.

Malheureusement, la question de l’aviation de montagne dans la haute vallée de l’Arve est définitivement réglée avec la fermeture, puis la destruction de la piste de Sallanches (LFHZ).

Éléments recueillis par Bernard Amrhein


SOURCE

  • La grande aventure de l’aviation dans les Alpes (1784 à nos jours), Collection Media Histoire/Auteur Anthony Pinto/Édition 3d VISION/Volume 1.N° ISBN : 978-2-9533104-0-5.

Previous 5 mai 1960 - Un "Yéti" repéré au Dhaulagiri
Next 15 mai 2022 - Le parapentiste sud-africain Pierre CARTER s'élance depuis le col de l'Everest

No Comment

Leave a reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *